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Vin bio : les premières quilles bretonnes font leur entrée dans les caves et les restaurants

L’autorisation accordée en 2017 par l’Europe de produire du vin dans tous les territoires de l’Hexagone a vu la Bretagne se parer de nombreux projets. Une poignée de domaines commercialisent déjà leurs quilles, en bio essentiellement.

Mis à jour le 2 octobre 2024
Vin bio : les premières quilles bretonnes font leur entrée dans les caves et les restaurants

Île de Groix (56) – août 2024 – Cave restaurant Le 50. La bouteille de vin blanc (un chenin) trône sur le comptoir à l’entrée de l’établissement depuis quelques semaines. Une mise en avant particulière pour une cuvée qui l’est tout autant puisqu’il s’agit de la première issue de raisins récoltés sur l’île.

Aux manettes de l’exploitation : Mathieu Le Saux et Noémie Vallelian, un couple de vignerons installés sur le caillou depuis 2017. « Quand on a vu la ferme de Port Coustic, on a tout de suite eu le coup de foudre », se souvient Mathieu. Les premiers pieds sont plantés en 2019 sur un hectare. L’exploitation en comprend aujourd’hui trois au total.

Des vignes en quête de leur plein potentiel

Chenin, folle blanche, alvarinho, pineau d’aunis, grolleau… Parmi les cépages sélectionnés par les exploitants, seul le chenin a pour le moment permis de sortir une cuvée (environ 2 000 bouteilles). 

« Nos vignes ont encore besoin de temps pour exprimer leur plein potentiel. On va progressivement monter en puissance », pointe le vigneron. A terme, Mathieu et Noémie misent ainsi sur un doublement des rendements des pieds de chenin (deux tonnes de raisins produites pour la première cuvée).

Mathieu Le Saux et Noémie Vallelian ont planté les premiers pieds de vigne à Groix en 2019. Aujourd’hui, la surface viticole occupe trois hectares.

Dès l’année prochaine, les groisillons d’adoption, qui produisent par ailleurs 12 000 bouteilles de cidres par an et 2 000 de jus de pommes et de poires, prévoient de vendanger la folle blanche. L’année suivante, viendra le tour de l’alvarinho. Les autres cépages suivront. En parallèle, ils entendent bien continuer à développer leur surface viticole.

Les projets comme celui de Mathieu et Noémie se multiplient en Bretagne depuis quelques années. Le top départ a été donné par l’Union européenne en 2017, avec l’autorisation accordée à la France d’ouvrir la production viticole à l’ensemble du territoire. Là où auparavant, l’activité était réservée à certaines régions bien identifiées.

Une quarantaine de projets en Bretagne

Portés par la promesse d’un climat plus favorable au bon développement des vignes (lire sur le sujet l’interview ci-dessous de Valérie Bonnardot, climatologue spécialisée en viticulture), les acteurs bretons se sont emparés de cette opportunité au même titre que plusieurs autres territoires (Hauts-de-France, Île-de-France, Normandie, etc.).

Le domaine de Loïc Fourure s’étend sur six hectares et comprend cinq cépages historiques de la zone septentrionale française (Loire, Bourgogne et Jura).

De Groix à Sarzeau (56), en passant par Saint-Jouan-des-Guérets (35), Theix-Noyalo (56), Locmiquélic (56) ou encore Cap Sizun (29), on dénombre aujourd’hui une quarantaine de projets dans la région. Particularité de cette production émergente : elle est intégralement certifiée bio ou en passe de le devenir. 

Loïc Fourure, producteur de vin à Theix-Noyalo, près de Vannes, est président de l’Association des Vignerons bretons (AVB), fondée il y a deux ans : « On apporte en Bretagne une nouvelle culture qui compte parmi la plus arrosée en pesticides. Pour nous, l’adoption d’un mode de production respectueux de l’environnement tombait sous le sens. Le cahier des charges bio, ça n’a pas été une question, c’était une évidence dès le départ ».

Un territoire viticole en cours de structuration

L’AVB regroupe 38 producteurs. Parmi eux, cinq produisent déjà du vin. « La plus petite exploitation fait 600 bouteilles, relate le président de l’association, la plus grosse 18 000. Demain, sur le millésime 2024, nous serons sept ». Pour le moment, les volumes sont naturellement absorbés en local : vente directe, caves et restauration commerciale. Exemple avec Marie Devigne et Guillaume Hagnier, deux vignerons basés à Sarzeau qui comptent déjà deux cuvées à leur actif (17 000 bouteilles l’année dernière).

L’exploitation écoule 70 % de sa production en vente directe et 30 % dans les caves et les restaurants. « On privilégie les professionnels qui connaissent les vins naturels ou bio et surtout qui savent en parler », explique Marie Devigne. 

L’exploitation de Marie Devigne et Guillaume Hagnier produit jusqu’à présent trois vins différents, deux blancs (chenin et chardonnay) et un rosé (cabernet franc). © Olivier Michelet

C’est ainsi que les vignerons rencontrent tous leurs revendeurs que ça soit au domaine ou lors de dégustations organisées dans leur établissement. « Il est essentiel qu’on puisse leur expliquer notre histoire, notre façon de travailler et les spécificités de nos vins. Et qu’ensuite ils s’en fassent le relais auprès des consommateurs ». 

Face aux volumes, la nécessité de nouveaux débouchés 

L’augmentation annoncée des volumes, portée par le nombre et l’engouement des acteurs bretons pose inévitablement, à termes, la question des circuits de destination. « On a aujourd’hui des vignobles qui ont planté jusqu’à 10 hectares et dont on sait que la production va exploser, explique Loïc Fourure. Il va nous falloir trouver d’autres débouchés. Les magasins bio ainsi que les épiceries fines en feront partie ». 

Déjà l’AVB a pris langue avec plusieurs sociétaires morbihannais de Biocoop. Des rencontres exploratoires, précise le président de l’association. Pour lui, on ne verra pas de vins bretons en magasin bio avant trois ou cinq ans. « Il reviendra de toute façon à chaque domaine de faire ses choix et de définir sa propre stratégie commerciale », conclut le professionnel. 


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Erwan Le Fur
Journaliste - Partner
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