« Évoluer vers une alimentation plus saine et plus durable est quasiment mission impossible à ce jour ». Le constat est sévère, mais appelle la grande distribution à un exercice d’introspection. La fédération d’associations luttant contre les causes du changement climatique, Réseau Action Climat, a procédé à l’analyse d’une quarantaine d’indicateurs liés à l’alimentation durable et au climat des huit grands distributeurs installés en France, à savoir les enseignes Auchan, Carrefour, Casino, E.Leclerc, Intermarché, Lidl, Monoprix et Système U. L’objectif ? Les noter sur leurs pratiques visant à accompagner les Français vers une consommation plus responsable, tout en garantissant la bonne rémunération des agriculteurs.
Résultat, si certaines enseignes font mieux que d’autres, aucune enseigne n’est parvenue à obtenir une note supérieure à 10/20. « C’est donc l’ensemble de la grande distribution qui constitue un frein à la transition vers une alimentation durable, en incitant à la surconsommation de viande et de produits laitiers, provenant en immense majorité de modes de productions intensifs. 92 % des plats préparés contiennent de la viande ou du poisson, et moins de 10 % du poulet et du steak haché proposés en rayon sont bio », note le Réseau Action Climat au sein de son rapport.
Dans le détail des notes obtenues par les grands distributeurs , l’enseigne qui s’en tire le mieux est Carrefour, quand bien même cette dernière n’obtient que la note de 9/20, et E.Leclerc fait figure de mauvais élève avec 5,8/20. Concernant les autres distributeurs analysés, ils tiennent dans un mouchoir de poche, avec des notes s’échelonnant entre 6,9 et 7,5.
La note globale se compose de l’analyse de trois grands critères : la transparence de l’enseigne, les engagements de plans d’actions, et la promotion d’une alimentation durable. Sur le premier item (transparence), Carrefour arrive ex-æquo avec Lidl (Auchan est dernier) avec la note de 8/20. Sur le critère des engagements et des plans d’action, Carrefour est également en première position avec la note de 10,6/20 (unique note à passer au-dessus de la moyenne), et E.Leclerc se positionne à la dernière place avec 4,3/20. Enfin, s’agissant de la promotion d’une alimentation durable, c’est l’enseigne Système U qui se place à la première place (9,5/20), quand E.Leclerc est une nouvelle fois en dernière position (5,9/20).

Réseau Action Climat a par ailleurs voulu pousser plus loin son analyse en établissant des notes sur trois thématiques : Transparence et engagements sur les émissions de gaz à effet de serre, Vendre « Moins et mieux » de viande et de produits laitiers, et Promouvoir une alimentation plus végétale.
La fourchette sur laquelle s’étendent les notes sont ici beaucoup plus larges que dans le classement général, et s’agissant de la première thématique, Auchan arrive première avec 14,8/20 quand Système U est en dernière place. Cette dernière enseigne est en revanche première au classement portant sur le Vendre « Moins et mieux » de viande et de produits laitiers, tandis qu’ici, E.Leclerc est bon dernier (4/20). Enfin, troisième thématique, la promotion d’une alimentation plus végétale, c’est Carrefour qui domine avec 10,9/20 là où Système U partage la dernière place avec Lidl (6,2/20).
Faire évoluer l’offre avec des produits plus sains
Face à ces différents résultats, Réseau Action Climat rendu une série de recommandations, incitant notamment les enseignes à faire évoluer leur
offre avec des produits plus sains, plus durables (légumes secs, fruits et légumes et viande issus de l’agriculture biologique, etc.), plus accessibles, et vers plus de végétal, mais aussi changer leurs politiques de marketing, de marge ou encore de promotion.
De plus, selon la fédération, « l’ampleur des changements requis pour transformer la grande distribution » est telle, qu’elle appelle aussi à des politiques publiques ambitieuses comprenant par exemple le déploiement d’un affichage environnemental, l’interdiction de la publicité et du marketing pour les produits d’origine animal et les produits à base de viande (nuggets, burgers, pizzas, etc.), à l’exception des produits biologiques et du Label Rouge. Ou encore encadrer le taux de marge appliqué par la grande distribution sur les produits biologiques, et rendre plus accessibles financièrement les produits issus de modèles agricoles durables, dont l’agriculture biologique, « en renforçant les capacités financières des ménages, notamment via l’augmentation des minimas sociaux ».